En 1981, les masses adolescentes découvrent Duran Duran par le biais du single Planet Earth. Le son typiquement anglais ou, en tout cas, vu comme tel, les premières rumeurs d’un style post-punk nommé New Romantics qu’on retrouve dans la video du single en question et le physique d’ado boudeur de Simon Le Bon couplé au regard ténébreux de John Taylor vont finir de ravir le cœur des adolescentes d’alors.
Ce mélange New Romantics qu’on retrouve tout entier exposé dans la vidéo de Planet Earth, sorte de manifeste-hommage au style Ballets russes d’Yves Saint Laurent, qui avait fait sensation en 1976, avec le pantalon « moujik » de Simon, à la collection Pirate de Vivienne Westwood par bottes interposées, sans parler de ces magnifiques chemises à jabot tout droit sorties d’un duel à l’épée sur un pré désert un beau matin à l’aube…. Las, le maquillage n’est pas encore à l’honneur même si le khol fait son apparition et même si les coupes sont loin des excentricités capillaires des années à venir ou du génie stylistique d’un Adam Ant. Le couple emblématique du style New Romantics qu’on voit danser à la fin de la video nous clame haut et fort ce que nous, ados bavant devant cette débauche de branchitude, avions déjà compris…. Ce groupe marque la tendance pop new wave de cette année 1981.
Le filtre légèrement glacé de l’image, le plateau « cristal de roche » qui ne peut qu’émouvoir aux larmes le gamin fan de Superman qui aura reconnu ce clin d’œil à peine voilé à la Forteresse De Solitude, ces ondulations typiquement new wave de Simon qui, pendant toute sa carrière, nous fera pleurer sur son manque de rythme évident, le sérieux avec lequel Nick Rhodes envisage son rôle de claviériste et l’évidente concurrence qu’il faudra trancher avec Martin Gore (quoique Martin se maquillera moins mais s’habillera de manière plus putassière que Nick même s’ils reconnaissent tous les deux une admiration sans borne pour Bowie qui conseillera d’ailleurs à Nick de garder précieusement toutes ses tenues)….tout cela va concourir à faire de Planet Earth un single et une vidéo qui resteront dans les mémoires.
Le 2ème single, Careless Memories, est accompagné lui d’une vidéo totalement kitsch même pour l’époque et d’un jeu de scène de Simon qui ferait passer Gérard Rinaldi pour Sir Lawrence Olivier, c’est dommage… Le rythme du morceau, lui, est plutôt digne d’intérêt. Même si à mon sens, Anyone Out There aurait dû être le choix du deuxième single ne serait-ce que grâce à son intro mirifique.
Le vrai morceau de bravoure de cet album sera sans doute le 3ème et dernier single, Girls On Film. Pensez donc ! Une vidéo censurée par la BBC pour cause de sumo maltraité par une poulette gracile mais costaude, d’une nurse masseuse forcément perverse et d’une cow-girl caucasienne chevauchant une monture humaine à la peau noire… Dans mon cas, je pense que le vrai motif de bannissement aurait dû être l’écharpe en soie blanche nouée autour du front de Simon mais il allait là lancer une mode d’habillement frontal qu’on n’était pas prêt d’oublier dans les années à venir. On ne saurait regarder cette vidéo sans avoir une pensée émue pour les créateurs du mythique Embrasse-moi, Lucile qui ont dû créer le groupe Bee Hive sur le modèle des DD d’alors (jetez un œil aux cheveux des personnages tiens pour voir !)
Un petit point sur Tel Aviv et son ambiance world music avant la lettre (et avant même que Peter Gabriel ne vire illuminé). Un morceau instrumental qui se laisse écouter même si dans le genre instrumental The Chauffeur aura une autre allure. On sent que la vie au kibboutz a laissé des traces chez Simon Le Bon mais qu’heureusement il s’est arrêté avant de faire un duo avec Ofra Haza (paix à son âme).
Bref, amis fans des années 80, on ne s’arrête pas sur les idées toutes faites crétinesques des « Duran Duran c’est du boys band à 3 balles » et on achète ce chouette album pour se flatter les oreilles de clavier pêchu, de lignes de basse qui vous résonnent dans la tête. J’en mettrai presque mon écharpe autour du front et mes pirates boots, c’est vous dire ….
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